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mercredi 18 avril 2012

SOUK-AHRAS : Les mines antipersonnel continuent de tuer




Onze millions, c’est le nombre de mines enfouies sous terre par l’armée coloniale à partir de juin 1957. Un peu plus de huit millions ont été détruites depuis quarante-sept ans, mais il ne faut pas se leurrer, les mines antipersonnel représentent toujours une menace pour les citoyens.Le recensement établi le 19 juin 1996 lors d’un séminaire à Naâma par les chercheurs du Centre national d’études et de recherche estime à environ 1,3 million les mines disséminées encore le long des frontières algériennes de l’est et de l’ouest,s’étendant sur près de 14 000 km dont 91 300 le long de la frontière orientale sur une distance de 460 km allant de Annaba à Négrine en passant par Souk- Ahras, Tébessa, El-Mabiod et Bir El-Ater et 42 000 autres à la frontière occidentale s’étendant sur une longueur de 700 km, de Marsa Ben M’hidi à Béchar en passant par El-Aricha, Mechria, Aïn-Sefra, Djenane Bourezque et Béni-Ourif. Les plus répandues et les plus meurtrières ces cinq décennies, sont les APID 21 (mines encrier) et les bondissantes de type APMB 51/5 qui ont été les plus utilisées par l’armée française. Ces engins de la mort ont provoqué immanquablement des pertes humaines incommensurables surtout les enfants et les bergers. Près de 20 personnes sautent sur des mines datant de l’époque coloniale, celles qui ont la chance de survivre sont mutilées et handicapées à vie. Après plus d’un demi-siècle, ces engins demeurent actifs. L’on se souvient encore de ce vendredi du 18 mai 2001 dans la Mechta d’El-Féène (commune de Ouled Driss, wilaya de Souk- Ahras), où l’explosion d’une mine antipersonnel a fait trois morts et deux blessés ; l’enfant ramasse l’objet, il le prend pour une boîte de conserve, finalement, il explose. Il tue sur le coup les deux sœurs Nacira et Fatiha Guerfi, âgées de 12 et 5 ans, leur frère Rahim, 3 ans, décède lors de son évacuation vers l’hôpital. Le 16 décembre 2004, dans la localité de Aïn El-Hedid, wilaya de Aïn-Témouchent, un jeune enfant de 13 ans, berger de son état joue avec une mine qu’il a trouvée alors qu’il faisait paître ses bêtes dans les pâturages, l’enfant a eu un bras sectionné et son visage défiguré par l’explosion, la victime décéda au cours de son évacuation à l’hôpital de Frenda. En 2006, dans la région de Haraza, du côté de Aïn- Sefra, plus précisément au mois d’octobre, le jeune Moghrad Mejdoub, fils d’un nomade et à peine sorti de l’enfance, a perdu la vie, il a été pratiquement décapité parce qu’il a voulu voir ce qu’il y avait dans cet objet curieux. Un autre exemple, et pas des moindres, en novembre 2007, le jeune Morsli Bendaoud, âgée de 17 ans, trouva sur son chemin une mine à quelques encablures de Mechria ville, cet objet lui fera perdre un œil. Il est à rappeler qu’en 2007, 28 mines antipersonnel ont été découvertes par des maçons, enfouies sous terre dans l’enceinte de l’école primaire (Sedour- Brahim), daïra de Taoura (wilaya de Souk-Ahras). Autres découvertes pendant le premier semestre de l’année 2009, des armes de guerre et des mines datant de l’époque coloniales ont été trouvées dans un tunnel au niveau du CEM Badj- Mokhtar (ex-caserne 15/3). D’autres mines ont été découvertes ces jours-ci dans un autre établissement scolaire à Ouled Driss (wilaya de Souk-Ahras). Les mines disséminées à travers les frontières est-ouest de l’Algérie continuent de faire des victimes, elles sont à l’origine de la mort de 3 526 personnes et 3 000 autres sont handicapées à vie. Au moins 51 communes réparties à travers sept wilayas de l’est à l’ouest, à savoir Tlemcen, Naâma, Béchar, Tébessa, Souk- Ahras, El-Tarf et Guelma sont touchées. 3 064 180 mines, tous types confondus, ont été plantées sur 1049 km, 750 pour la partie ouest du pays (wilayas frontières de Tlemcen, Naâma et Béchar). Elles ont fait jusqu’à aujourd’hui des milliers de morts et des mutilés. Le nombre des victimes des mines antipersonnel, au niveau de la bande frontière de la wilaya de Naâma, est estimé à ce jour à 133 personnes invalides selon des statistiques officielles. Malgré les opérations de déminage effectués par l’ANP ces dernières années à travers les régions de Djeninne Bourezk, Benamar, Aïn-Benkhlil et Sfififia, le risque reste encore élevé. La seule région de Ouled Driss (wilaya de Souk-Ahras), une région particulièrement touchée, compte plus de 511 victimes.La wilaya de Tébessa fait état de 727 victimes de l’indépendance à ce jour. Les mines individuelles arrachent un pied, alors que les mines collectives contenant 400 morceaux de fer déchiquetèrent sur plus de 60 mètres carrés. Un simple contact les fait exploser. Ils tuent une faction importante de personnes isolés. Il n'y a pas uniquement les citoyens qui sont touchés par les mines, le bétail fait aussi les frais de ce fléau, souvent un mouton, une vache passe sur une mine et provoque une explosion qui tue et blesse plusieurs autres. Selon des spécialistes, les soins chirurgicaux et la pose d’une seule prothèse coûtent environ 2 000 euros par victime et pour les enfants la prothèse doit être remplacée tous les six mois. De nombreuses opérations de grande envergure ont été entreprises par l’ANP pour le déminage des zones minées entre 1957 et 1959, un travail de longue haleine entamé juste après l’indépendance et qui s’est soldé par la dépollution de 1 482 km sur les 2 500 entre 1963 et 1988, en sus de l’élimination de 41 600 mines entre 2004 et 2009 permettant de récupérer 2 000 hectares de terrain. Certes, le déminage a abouti à éliminer plusieurs milliers de ces engins de la mort, mais cela n’a pas pour autant arrêté l’hécatombe. Tébessa, Souk-Ahras, Mechria et Naâma sont les régions les plus touchées, et selon une source, plus de 800 victimes ont été dénombrées depuis 1962 dans la wilaya de Tébessa. La région de Mabiod, une zone agropastorale traversée par les nomades, a enregistré des dizaines de victimes de ces engins de la mort entre 1962 et 1985. De même, il est à noter qu’à Souk-Ahras ville, ce fléau a fait des ravages. En 1963, l’hôpital régional a recensé plus de 300 pieds de mines, terme utilisé communément à l’époque par le personnel hospitalier ; la région de Bouhadjar (wilaya d’El-Tarf), une zone infestée par ces engins de la mort, a fait aussi les frais, idem pour l’ouest du pays, à Tlemcen. A titre d’exemple, il existe 119 mutilés depuis l’indépendance.

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